En mai 2019*, lors des troisièmes universités d’été des abeilles organisées par Guerlain, chercheurs, naturalistes, politiques et ingénieurs se sont réunis à l’Unesco pour parler vivement des abeilles et de l’érosion de la biodiversité. Ils ont affiné le diagnostic, pointé le frelon asiatique, raconté les avancées de la recherche ; ils ont montré l’importance des collectivités, de la politique dans l’action en faveur de la biodiversité, et la nécessité de rendre celle-ci… désirable, nonobstant le constat angoissant.
*(je me suis rendu compte que cette infolettre, programmée pour septembre, n’est en fait jamais partie de mon serveur, pour une raison qui m’échappe)
Les abeilles, sujets de politique
(photos ©Arnaud Joron/ Guerlain)
Dans une salle immense à l’architecture béton très… ONU, où le groupe LVMH venait de signer un partenariat de cinq ans avec l’Unesco (voir en pied d’article), Shamila Nair-Bedouelle, sous-directrice générale pour les sciences exactes et naturelles de cet organisme des Nations-Unies a ouvert les débats en considérant les insectes, « ces guerriers silencieux », comme de grands oubliés, parce que personne « n’est au courant du rôle important qu’ils jouent. » Elle aimerait voir la création d’un observatoire spécifique à l’abeille, à l’échelle du monde, et, surtout, que « la biodiversité entre comme valeur sociale et économique » dans notre tête. Qu’elle ait une importance intrinsèque, qu’elle soit considérée comme un patrimoine, au même titre que nos monuments et nos grands sites.
Querelle sur les chiffres, accord sur le climat
Opposés dans l’ampleur du constat, Henri Clément, apiculteur et porte-parole bien connu de l’Union nationale d’apiculture française (UNAF), et Nicolas Géant, apiculteur et créateur de la société de services – aux apiculteurs – Beeopic, partagent ce rêve, et font un bilan semblable : la situation des abeilles n’est pas fameuse. On le sait. Cela dit, « on n’a pas de chiffres de mortalité précis, car on n’a pas de chiffres précis du nombre de ruches en France, à la fois chez les professionnels et les amateurs », rappelle M. Géant qui estime que le taux de mortalité est dix fois supérieur chez les amateurs ce qui, du coup, par la moyenne, fait accroire en un taux très élevé chez les professionnels. Un taux qui serait de toute façon moindre chez ceux-ci « s’ils étaient formés, c’est un des rares métiers sans formation ! » Appliquant ce qu’il demande, M. Géant a envoyé son fils, qui voulait reprendre le flambeau, dans un tour du monde de deux ans pour apprendre son métier. Selon lui, il n’y a pas de problèmes qu’on n’arrive à surmonter, même si, comme M. Clément, il remarque que « les abeilles ont faim, et mangent mal. Nous, on fait attention à manger sain, de qualité, les abeilles, elles, on les met sur du colza, ou sur de la lavande, point. Comme si on donnait à nos enfants un mois que de la choucroute, puis du jambon-beurre… »
La preuve est fournie par ces endroits où l’agriculture est restée en mosaïques paysagères. « À Ouessant par exemple, le taux de mortalité est toujours de 5 % ! », rappelle Henri Clément. Cela tombe bien, Guerlain soutient le conservatoire de l’abeille noire installé sur l’île bretonne. « Le taux est de 30 % ailleurs. Et en plus, il y a les miels adultérés [coupés avec des sirops de sucre] qui nous concurrencent. » Affaiblis par la chute de leurs colonies, les professionnels le sont par celle des prix des produits importés. À qui en vouloir ? « Aux pesticides, au varroa, à l’agriculture, enfin aux prédateurs comme le frelon asiatique, dans l’ordre ». Et puis, au réchauffement climatique qui commence à se sentir, selon Henri Clément : « on a des hivers très doux, donc, des démarrages de colonies précoces, puis des périodes de mauvais temps au printemps, puis en été des périodes plus longues de vents du Nord qui dessèchent les fleurs, et des périodes de canicules : le résultat est que les abeilles manquent de nectar et de pollen et entrent en hiver fatiguées. »
Le frelon, la menace que l’on ne veut pas voir
Deux points ne sont pas assez pris en compte dans l’accusation. Les néonicotinoïdes et le frelon asiatique. On s’étonne. On interroge. Jean-Marc Bonmatin, chargé de recherches au CNRS, insiste : « Les néonicotinoïdes sont très toxiques pour les invertébrés et les vertébrés, car ils attaquent le cerveau. On n’avait pas du tout prévu qu’ils se retrouvent jusque dans les fleurs ! Mais voilà, on les a rendus solubles dans la sève, ils ne se dégradent pas dans la plante, en plus, ils sont solubles dans l’eau… » Depuis presque trente ans, ils embêtent le monde. On a mis beaucoup de temps à les interdire, en dépit des alertes venues des campagnes dès le début des années 1990. Chercheur à l’Institut de recherche sur la biologie de l’insecte (IRBI), Éric Darrouzet n’oublie pas de désigner un autre accusé, insuffisamment considéré à sa juste malfaisance selon lui, le frelon asiatique : « En théorie il est moins fort que le frelon européen, qui est plus agressif, mais voilà, il est plus rustique, plus plastique, il se retrouve chez nous dans des conditions qui lui sont plus favorables, sans ses prédateurs et ses parasites habituels…, » alors le frelon asiatique peut investir plus sur la reproduction. C‘est rentable : un nid de frelon européen, c’est 3 000 alvéoles, avec un nid d’asiatique, le comptage monte à 10 000. « Les élus, les décideurs ne prennent pas suffisamment le problème au sérieux. Or, non seulement il s’attaque aux abeilles, ce frelon, en plus il s’en prend à toute la biodiversité ! À tous les insectes qui l’entourent. » Par-dessus le marché, il aime les fruits, en particulier la fraise et la framboise : les rendements baissent ici et là chez les producteurs. Des boucheries se plaignent aussi de la présence de l’insecte dans leurs boutiques, qui fait fuir les clients. « Mais ça ne semble pas intéresser la recherche. On a des projets pour localiser les nids – par radio, puce RFID, drone etc. – et pour les détruire par chaleur, mais on n’a pas de financements… », ce que déplore également M. Bonmatin.
Secrétaire générale de l’IPBES et à ce titre, rapporteure du travail sur l’état de la biodiversité qui a fait les gros titres en mai 2018, Anne Larigauderie partage le réquisitoire. Elle n’oublie pas cependant de rappeler qu’une bonne partie du rapport est consacrée aux choses qui vont mieux, aux solutions trouvées ici et là. « Il y a un risque de n’y lire et de n’entendre que le catastrophisme et uniquement la biodiversité patrimoniale, celle qui nous intéresse. Or, je vous dis qu’il n’est pas trop tard, et on voit que les entreprises en France avec la signature de l’engagement Act for Nature, on voit que des banques ou même l’AFD [Agence française de développement] commencent à s’engager. » Certes, mais tout semble lent, aussi intrique qu’une reine abeille frappée de léthargie. Une reine qui se réveillerait ? Me. Larigauderie a en effet été surprise par l’ampleur inédite des réactions suscitées par le travail de l’IPBES. « Plus de 24 000 articles de presse dans 150 pays, c’est énorme. Mais surtout, on a été ensuite auditionné par les parlements de pays comme l’Écosse, l’Irlande, et même le Congrès américain, c’est du jamais vu, là-bas. »
La libre circulation des biens contre la préservation des territoires ?
La biodiversité devient un acteur social, grâce à son ambassadeur meurtri, l’abeille domestique. Quand on est une entreprise ou une collectivité, il est désormais un peu honteux de s’en fiche complètement, de continuer à abîmer la beauté des choses. C’est un bon début, même pour Henri Clément qui en a vu d’autres : « c’est inespéré ce qu’on voit, ce genre de réunion. Il y a quinze ans, c’était inimaginable, l’abeille a enfin retrouvé ses lettres de modernité ! » Saura-t-on en quinze autres années abolir les insecticides, réorienter l’agriculture vers une polyculture-élevage douce avec les écosystèmes, cultiver sur des parcelles moins longues afin de ne pas décourager les insectes, mettre en place des rotations culturales de qualité, gérer les forêts en tenant compte de leur diversité floristique, soutenir les apiculteurs dans leur formation, étiqueter le miel pour identifier les épouvantables adultérés, donner des sous aux chercheurs ? Me Larigauderie, MMs Bonmatin, Darouzet, Clément, Géant et Thierry Dufresne, président de l’Observatoire français d’apidologie (AFA) et grand promoteur de la formation des apiculteurs, également présent lors de ces troisièmes universités, ont déployé un éventail d’idées pour que les choses aillent mieux.
Par défaut, Jacques Kermagoret peut valider la plupart. Depuis Ouessant, il est loin du continent. Il observe. « Ici, il n’y a jamais eu des pesticides, le parcellaire est très morcelé et rend toute culture avec engin difficile. Sur le continent, la perte en prairies sauvages où les vaches venaient paître, remplacées par des champs de maïs et de blé qui sont des déserts intoxiqués, a fait chuter la flore sauvage. » En plus, sur l’île, les abeilles ne sont pas loin d’un littoral fort peu urbanisé, elles ont donc accès, en plus, à une diversité de fleurs particulières. « Tout ça fait que les abeilles amènent à la ruche des nutriments et des protéines » et une profusion de nectars. Protégée par son éloignement, l’île l’est également par un paquet de règlements et de classements : Parc naturel régional d’Armorique, Site classé, Réserve biologique (pour les îlots), divers sites Natura 2 000 ou propriétés du Conservatoire de l’Espace littoral et des rivages lacustres, Réserve naturelle d’Iroise (pour trois îlots), réserve de chasse et de faune sauvage de Béniguet (un de ces îlots), Parc naturel marin d’Iroise, l’île est enfin classée Réserve de Biosphère de la Mer d’Iroise. Par l’Unesco.
« Ces réserves ont été créées en 1971, à peu près en même temps que les parcs régionaux. Les deux se ressemblent : conserver en maintenant les activités humaines », explique Meriem Bouamrane, responsable du programme Man and Biosphère (l’autre nom des réserves de biosphère) à l’Unesco. Il y en a près de 600 dans le monde, dont seize en France. « On fait en sorte que les populations n’aient pas l’idée qu’on restreint leurs droits. Notre question est simple quand on inspecte un lieu susceptible d’être classé : qu’est-ce que les gens veulent conserver et transmettre ? » On ne peut pas protéger sans impliquer les communautés locales. Les gens, aussi, les gens, d’abord. « On a été très pionnier pour mettre sur un même plan nature et culture ! » L’île d’Ouessant est « sauvage » parce que des hommes et des femmes la travaillent en prenant garde à ne pas la dégrader. Petit-cousin du classement au patrimoine mondial de l’humanité, le logo « réserve de biosphère » est un brevet moral qui attire et oblige. « Protégeons, oui, mais avec les abeilles, j’aimerais qu’on n’oublie pas une chose : cet environnement exceptionnel qu’est l’île d’Ouessant pourrait être menacé si des ruches venues du continent, depuis des zones contaminées par le varroa ou le frelon asiatique, y étaient importées. On est protégé de cela par un arrêté préfectoral, mais ce serait mieux si on interdisait ce genre d’échanges à l’échelle de l’Europe. » La libre circulation des biens et des personnes, fondement de la construction européenne, favorise la prolifération de ce qui affecte les abeilles.
L’exemple du 93
Il faut des fleurs, partout. Des fleurs pleines de nectars qui arrivent au bon moment là où sont les abeilles. De la biodiversité en ville, dans les rues, sur les toits, les parcs. « Il y a trop de ruches domestiques, ça concurrence les abeilles sauvages, alors soit on diminue le nombre de ruches, soit on augmente la quantité de nourriture », philosophe Belaïd Bedreddine, vice-président du Conseil départemental du 93 en charge de l’écologie urbaine. « Moi j’ai pris l’autre option, je veux développer la nature en ville. Par exemple en cassant les cours des collèges, et en ciblant les endroits les plus moches, que personne n’a envie de garder. » Défenseur de la beauté qui rend meilleure la vie des mal lotis, selon lui, convaincu que la biodiversité est un outil en soi pour améliorer la qualité de la vie, M. Bedreddine s’est heurté aux parents d’élèves qui ne voulaient pas voir leurs enfants tout crottés et à quelques enseignants qui avaient peur des accidents par glissade sur feuilles mortes. « On les a convaincus. En plus ce sera un support pédagogique, ça rafraîchira les élèves au printemps et en été, et ça intéresse même l’agence de l’eau : en désimperméabilisant les cours, on ralentit l’écoulement des eaux pluviales vers les égouts. » Raison pour laquelle l’agence de l’eau finance en partie ce programme qui, démarrant bientôt avec un collège de Pantin, concernera à terme une trentaine d’établissements. Des arbres, de la prairie, des noues, une mare, un potager, les collégiens auront autre chose regarder que leurs écrans. « Pour ça, on a fait en sorte que tous les services travaillent ensemble. ESS, transition énergétique, citoyenneté, on a mis les budgets en commun. »
Le département a acheté une parcelle à l’Île-Saint-Denis pour y planter 1,5 ha de fleurs à couper, afin de décorer les mairies du département avec des bouquets labellisés « fleurs locales du 93. » Dans un espace de 3 ha où des emplois d’insertion produiront aussi du compost. « Au parc du Sausset, on a lancé un appel à projet de 3 ha pour faire de l’agriculture urbaine. On recherche un vrai paysan qui fasse sans produits phytosanitaires, en conservation des sols et pour qu’il ait un revenu, on a signé avec la gare de RER pour qu’il puisse y vendre ses produits. » Le fil est tiré jusqu’au bout, la biodiversité passe par le potager qui passe par l’estomac des citoyens. Tout est lié, tout est compris. M. Bedreddine a aussi obtenu que cette gare de Villepinte-Aulnay dispose d’une halte-garderie. Applaudissements spontanés de la salle. Par deux fois.
Rendre visible et désirable la biodiversité
De quoi lui décerner le label APicité ! Chargé de mission et responsable du développement du label délivré par l’UNAF, Gabriel Peña sourit. « Dans le 93, il n’y a que Montfermeil qui a été labellisé », avec deux abeilles en décoration, comme deux grades, c’est-à-dire une qualification de « démarche remarquable ». Avec une abeille, c’est démarche reconnue, avec trois, démarche exemplaire. « On décerne le label lors du salon des maires, après qu’on ait étudié les dossiers sous l’aspect du développement durable, de la gestion des espaces verts, des actions pour la biodiversité et de sensibilisation et, enfin, en faveur de l’apiculture. » Multiplier les ruches ne suffit pas, il faut que chaque commune, qui candidate d’elle-même, intègre cela dans une démarche globale et cohérente. L’Unaf, l’association Noé Conservation, l’Association française d’agroforesterie et Hortis, l’association des responsables des espaces verts municipaux, étudient ensemble les dossiers. « Idéalement, une ville APicité, fait de la plantation mellifère pérenne, elle consacre un budget conséquent aux questions environnementales, elle intègre des critères de biodiversité dans ses appels d’offres etc. » Ce serait bien aussi qu’elle tienne compte un peu plus du frelon asiatique, estime M. Peña qui aimerait que la note finale englobe le problème. « Il y a de tout dans les dossiers. Ce qu’on voit cela dit est qu’ils sont meilleurs qu’au début [en 2016], et qu’en 2018, toutes les communes déjà labellisées ont postulé à nouveau ». APicité serait-il un brevet de bonne conduite valorisant comme l’est la réserve Man and Biosphère ?
Une autre façon de rendre désirable la biodiversité, l’abeille, est de montrer qu’elle nous fait du bien. Grand œuvre de Patrice Percier du Sert, créateur de l’Air des ruches. « J’ai découvert ça en Ukraine lors d’un congrès, en 2013. Des cabanes où on respirait l’air qui venait des ruches. Là-bas, c’est reconnu en traitement de première intention pour les asthmatiques. » En France, pas du tout, ce qui n’empêche pas des malades de venir respirer l’air des ruches dans le centre de M. Percie du Sert, situé à Clermont-Dessous, village du Lot-et-Garonne près d’Agen. L’effet est d’après les témoignages très apaisant, bien s’il repose en partie sur des composés organiques volatils fabriqués par les abeilles, dont on ne connaît pas l’éventuelle toxicité à long terme.
Sandrine Sommer préfère aller parler de la biodiversité dans les écoles. À la tête du développement durable et de la RSE chez Guerlain, elle a monté le programme BeeSchool : « Notre but est de former mille collaborateurs en France et ailleurs dans le monde afin qu’ils soient des ambassadeurs de la biodiversité dans les écoles. » Dûment formé, chaque membre de la maison part faire découvrir aux enfants de 8 à 10 ans le rôle de l’abeille, les enjeux de la biodiversité et du climat, ce qu’on peut faire. « Ça les rend fiers, croyez-moi, et pour les maîtresses, cela leur donne une thématique sur l’année. » Un quizz, des ateliers, des questions, un jeu de cartes sur les pollinisateurs, et un diplôme.
Et cela rend sans doute plus concret une thématique trop souvent réduite à des considérations théoriques, à peine illustrées. Rendre visible ce qui ne l’est pas dans notre imaginaire collectif, c’est aussi le but de Juliette Dorizon. Cette designer formée aux Arts déco de Paris a découvert l’apiculture sur les toits de New York. « Je me suis dit que les ruches n’avaient pas évolué depuis leur création vers 1860. La ruche à cadre, c’est une boîte à chaussure ! Alors j’en ai inventé une autre, » qui ressemble à une pieuvre à la verticale, ou bien aux vaisseaux de la Guerre des Mondes. Très graphiques, attirants, moins tristes que les ruches classiques. Voici des octogones en bois, surmontés d’un toit, posés sur des pieds. « Comme elle est plus haute, ma ruche, les apiculteurs ne se cassent plus le dos. La forme crée une meilleure aération et les abeilles y mettent plus de miel. » Un peu la logique de l’hexagone, forme déjà adoptée par les abeilles pour constituer leurs cellules. « Mon but n’est pas d’équiper les professionnels, ma ruche ne les intéressera pas forcément, non, mon but est d’agrémenter de manière esthétique l’espace où les particuliers ou les entreprises ou les collectivités vont en installer. Ça attire le regard, » et ça modernise l’apiculture, pense Juliette Dorizon qui fabrique tout elle-même.
Connecter
Une autre façon de remettre au goût du jour une activité ancienne est de la connecter. Tout est connecté aujourd’hui. Pourquoi pas les ruches ? Chercheur au Centre de recherches sur la cognition animale de l’université Paul Sabatier de Toulouse, Mathieu Lihoreau a connecté des ruches… et des fleurs pour mieux observer les bourdons. « Je travaille sur la cognition des abeilles, en particulier sur l’influence de l’environnement sur leur comportement. On a mis des balises sur des bourdons qu’on a suivi sur une prairie pour voir ce qu’ils faisaient, comment ils se nourrissaient. Comme les abeilles, ils ont un petit cerveau, assez fragile, alors que butiner nécessite de s’orienter dans des grands espaces, d’apprendre à localiser et discriminer les plantes, de faire des circuits etc. » Sur l’écran, c’est fascinant, le bourdon apprend, s’adapte, corrige ses erreurs. Ou pas. « On voit que les abeilles ont faim. Elles équilibrent leur régime alimentaire quand elles ont le choix. Sinon, elles mangent toujours la même chose. Elles sont coincées. » Avec les élèves du Lycée La Morandière de Granville en Normandie et la Fondation Dassault System, M. Bihoreau a inventé une fausse fleur qui, implantée à proximité d’une ruche, analyse des paramètres de l’environnement et les déplacements des abeilles. « On connaît très mal la façon dont les abeilles sélectionnent les fleurs disponibles dans leur environnement et se déplacent entre elles. Cela est dû à la difficulté de suivre un grand nombre d’individus, parfois plusieurs centaines dans une seule colonie, sur de grandes distances et de longues durées. Cette fleur artificielle, placée au milieu de fleurs naturelles, délivre des quantités contrôlées de nectar et de pollen artificiels, enregistre les visites des abeilles qui butinent sur la fleur, et les identifient individuellement. À terme, ces fleurs pourront communiquer entre elles pour créer des « champs connectés ». Comment les abeilles exploitent leurs ressources ? Elles servent déjà à faire de la science participative avec des adolescents qui n’étaient pas forcément passionnés par les sciences de la vie et de la Terre. Les abeilles, ambassadrices comme Michel Serres du gai savoir !
NB : qu’est-ce que le partenariat LVMH-Unesco ? « Avec ce partenariat, le groupe sera présent à côté de l’Unesco durant les événements internationaux à venir, et nous nous appuierons sur l’Unesco pour améliorer notre politique de développement durable », a rappelé en ouverture Laurent Boillot, le PDG de Guerlain. Concrètement, ce partenariat doit permettre « d’ici 2020 d’améliorer la performance environnementale de 100 % de nos produits, ou encore de réduire nos émissions de CO2 liées aux consommations d’énergie de 25 % d’ici 2020 par rapport à 2013, et, pour chacun de nos sites, d’améliorer d’au moins 10 % les indicateurs clés de l’efficacité environnementale (consommation d’eau, consommation d’énergie, production des déchets), » a ensuite détaillé Sylvie Bénard, emblématique directrice Environnement du groupe.