Sélectionner une page

Pour  » Une journée mondiale de l’élevage paysan et des animaux de ferme ! « 

Avec Paul Ariès et Jocelyne Porcher, on a remis ça. Quoi ? Une tribune ! Après celle parue l’an dernier dans Libé, qui nous avait valu la gloire d’une première de couverture et la médaille d’honneur des menaces de mort violente et de tortures expiatoires, voici un texte qui s’oppose – à la pétition faussement nutritionniste pour un Lundi vert, et qui propose : manger moins, oui, de la bidoche industrielle, pour manger plus de viande de qualité élevée en pâture ! Ami lecteur, je tiens à vous rassurer, l’élevage, ce n’est pas mal, ce n’est pas pécher. Ça peut même être très écolo. La liste des signataires s’allonge chaque jour, elle est déjà bien fournie (Slow Food, Biolait, c’est pas mal, non ?!). Mais en plein Salon de l’agriculture et alors que L214 et Hugo Clément sortaient leurs bréviaires en librairie, Le Monde ne nous a diffusés que sur son site, ce qui a considérablement réduit la portée de notre texte. Peu importe, vous êtes là ! Si vous voulez signer et diffuser ce texte, ne vous retenez pas, on vous dit merci d’avance. 

Tribune publiée dans 

Le Monde

Pour signer, c’est ici et 

TRIBUNE. Le politiste Paul Ariès, le journaliste scientifique Frédéric Denhez et la sociologue Jocelyne Porcher dénoncent dans une tribune au  » Monde  » le mépris de classe de celles et ceux qui sont obsédés par l’antiviande. Ils proposent une série de mesures en faveur d’un élevage de qualité.

Cet appel initié par Paul Ariès (politiste), Frédéric Denhez (journaliste scientifique), Jocelyne Porcher (sociologue) a déjà reçu le soutien de plusieurs  milliers de signataires grâce aux engagements collectifs de la Confédération paysanne, du MODEF, de Slow Food International, de Biolait, de Nature & Progrès, des AMAP, de nombreux parlementaires insoumis et communistes, d’élus EELV, de personnalités des gauches politiques, syndicales, mouvementistes, d’universitaires, de chercheurs spécialistes, de citoyens, etc. La liste intégrale des « premiers signataires » est consultable sur le site du Monde. Vous pouvez aussi signer cet appel sur ce site pour témoigner de votre soutien (pour signez aller tout en bas de cette page).

Nous assistons mondialement à une montée en puissance de lobbies qui cherchent à imposer le principe des « Lundis sans viande », sous des prétextes idéologiques qui se cachent mal derrière des apparences écologiques et sanitaires. Cette exigence est même relayée par le forum économique de Davos : déclarer la nécessité de réduire sa consommation de viande pour sauver le climat quand on sort de son jet privé, c’est assez baroque ! Nous défendons, depuis des années, une réduction drastique de la consommation de produits animaux issus des systèmes industriels, notamment pour des raisons de respect des animaux, de santé humaine et animale et de lutte contre le changement climatique, mais nous sommes inquiets face aux fausses évidences en vogue. La vraie alternative n’est pas entre protéines animales et végétales mais entre production industrielle de viandes et de céréales d’un côté et défense d’une agriculture paysanne et d’un élevage paysan d’un autre côté.

Remplacer des viandes, des fromages, du lait issus de l’élevage paysan par des céréales produites industriellement ne serait en rien un progrès. Remplacer des viandes, des fromages, du lait issus de l’élevage paysan par des produits de l’agriculture cellulaire (fausses viandes réalisées à partir de cellules souches par exemple) serait catastrophique. En quoi passer d’un monde AVEC animaux de ferme à un monde SANS animaux de ferme changerait-il fondamentalement les choses ? La faim dans le monde, le réchauffement planétaire, la crise de l’eau potable ne sont pas simplement la conséquence d’un régime alimentaire mais plus fondamentalement d’un système économique financiarisé.

Revendiquer un monde sans produits animaux, un monde uniquement végétal, c’est un manichéisme commode car il détourne l’opinion publique des véritables problématiques. Qui peut croire qu’en ne mangeant plus de produits animaux tous les problèmes de l’agriculture, du climat et de la nutrition seraient réglés ? Pas davantage que ceux de la souffrance animale liée aussi à l’agriculture industrielle ! La focalisation des médias sur le « sans-viande » n’arrive pas à masquer l’absence totale de réflexion politique sur l’évolution du système agricole et alimentaire, alors même que l’écologie, c’est éminemment de la politique et du social. Les gilets jaunes montrent le désarroi d’un peuple à qui tout est reproché, ce discours très intellectualisant et moralisateur vient lui assénerqu’ils mangent mal, et qu’ainsi en mangeant mal, ils abîment la planète et les animaux. Il y a du mépris de classe dans cette obsession antiviande.

Imposons plutôt dans le secteur de la restauration sociale le choix de produits animaux issus du seul élevage paysan ou de l’agriculture biologique afin de garantir les meilleures conditions possibles d’élevage, une alimentation de qualité pour toutes et pour tous et de bonnes conditions de travail tout au long des filières. Généralisons la relocalisation des activités d’élevage, privilégions une alimentation herbagère locale et saine pour les animaux, limitons les déplacements d’animaux, instaurons des abattoirs locaux, défendons le principe de l’abattage sur place réalisé par des professionnels. Promouvons le mot d’ordre « naître, vivre et mourir à la ferme » défendu par « Quand l’abattoir vient à la ferme », des syndicats paysans, des associations écologistes et des protecteurs des animaux. Défendons en même temps la biodiversité animale et végétale.

La biodiversité végétale est extraordinairement supérieure dans les prairies entourées de haies bocagères par rapport aux champs cultivés (microfaune du sous-sol, flore, insectes, oiseaux et mammifères). Ajoutons que la clé de la fertilité de l’agriculture paysanne et de l’agriculture biologique repose sur le triptyque sol – végétal – animal, c’est-à-dire dire sur la polyculture élevage : il n’y a pas de maraîchage durable sans le fumier des animaux ! Il est temps d’écrire un nouveau récit de l’alimentation dans lequel l’animal est autant respecté que les humains qui l’élèvent et le mangent. Nous lançons l’idée d’une Journée mondiale de l’élevage paysan et des animaux de ferme, une journée AVEC 100 % de viandes et de produits animaux issus de systèmes d’élevage respectueux des animaux et de l’environnement, aux côtés de produits végétaux (céréales, légumes et fruits) issus de l’agriculture paysanne.

Liste des « premiers signataires » 

Paul Ariès, politologue, auteur de « Lettre ouverte aux mangeurs de viandes qui souhaitent le rester sans culpabiliser » (Larousse, janvier 2019) ; Frédéric Denhez, journaliste scientifique, auteur d « Acheter bio ?, A qui faire confiance » (Albin Michel, février 2019) ; Jocelyne Porcher, sociologue, directrice de recherches, auteure de « Vivre avec les animaux, une utopie pour le 21e siècle » (La Découverte, 2014)

Des organisations signataires

La Confédération paysanne ; le MODEF ; des AMAP ; Adabio (paysans bio en région Auvergne-Rhône-Alpes) ; Slow-food international ; Slow-food France ; Alliance Slow-food des cuisiniers de France, les 1200 éleveurs de Biolait ; Fédération régionale de l’agriculture biologique AURA 

Des élu.e.s et des personnalités politiques

Clémentine Autain, députée insoumise ; Michel Larive, député insoumis ; Loïc Prud’homme, député insoumis ;  Sébastien Jumel, député communiste ; Stéphane Peu, député communiste ; Alain Bruneel député communiste ; André Chassaigne, député communiste ; Jean-Paul Dufrègne, député communiste ; Eric Andrieu, député socialiste européen ; Jean-Claude Tissot, sénateur ;  Laurence Lyonnais, militante écosocialiste en secteur rural, candidate France Insoumise aux élections européennes ; Laurent Levard, agro-économiste, co-animateur agriculture et alimentation de la F1 ; Dominique Paturel, Groupe agriculture et alimentation de la FI ; Mounia Benaili, élue FI ;  Michelle Rubirolla, médecin, conseillère départementale EELV ; Stéphane Delpeyrat-Vincent, Conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, Generation.S ; Jeanne Meunier, EELV, Jacques OLIVIER, Maire honoraire du Thor (Vaucluse) EELV ; Danielle Estay, membre fondateur des AMAP de Guérande, EELV ; Maryse Oudjaoudi,  EELV Rhône Alpes ; BiniciLeyla, EELV candidate Européennes ; Lydia Labertrandie, EELV ;Catherine WalthertSelosse, EELV ; Gilles Bénard, EELV ;  Nathalie Perrin-Gilbert, Maire du 1er arrondissement de Lyon, candidate Lyon en Commun 2020.

Des personnalités du monde de l’agriculture

Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération Paysanne, Nicolas Girod, secrétaire national de la Confédération paysanne, référent du Pôle Elevage ; Jean Mouzat, Président du MODEF national ; Pierre Thomas, secrétaire général du MODEF national ;  Paul Caperan , Trésorier du MODEF national, Serge Mora, Président du MODEF des Landes ; Marylène Tardy Présidente du MODEF de Savoie ; Michel Coudert, Président du MODEF de la Corrèze ; René Gondran, Ancien président du MODEF des Bouches du Rhône ;  Jean Chey, Ancien président du MODEF Jura ; Sophie Bezeau,  Directrice du MODEF national ; Florian Monteil, Animateur du MODEF Lot et Garonne, Gers et National ; Sarah Manuby, Animatrice du MODEF Auvergne-Rhône Alpes 

Des personnalités du monde de l’alimentation

Carlo Petrini, Président de Slow-food international ; Xavien Hamon, Président de l’Alliance Slow-food des cuisiniers de France ;   Paola Nano, Porte-parole de Slow-food international ; Mouvement Inter-régional des AMAP (Pays de la Loire) ; Benoît Gauthier, Mouvement Inter-régional des AMAP (Bourgogne) ; Didier Loufrani, Réseau des AMAP du Tarn, MIRAMAP ; José Florini, Les AMAP de Provence ; Claudine Léhon, Les AMAP de Provence, MIRAMAP ; Alex Jestaire, Les AMAP de Provence ; André Lopez, Les AMAP de Provence ; Les AMAP de Provence ; Elisabeth Carbone, Mouvement Inter-régional des AMAP (Corrèze) ; Jérôme Dehondt, paysan bio ;  Jean-François Baudin, bibliothécaire, président Réseau AMAP Auvergne-Rhône-Alpes ; Jean-Brice Tulasne, Président Réseau AMAP Savoie ; Laurence Paccard, éleveuse en volaille AB, administratrice du Réseau AMAP Auvergne-Rhône-Alpes ; Marc Bardin, amapien et administrateur du Réseau AMAP Loire ; Isabelle BERARDAN, amapienne dans la Loire ; Jean-Pierre Mousset, administrateur Réseau AMAP Auvergne-Rhône-Alpes ; Philippe Chorrier, éleveur de porc AB dans la Loire en AMAP ; Andréa Blanchin, Réseau AMAP AURA ; Amélie Charvériat, Réseau AMAP AURA ;

Des personnalités scientifiques, écologistes, altermondialistes, médiatiques

Jean-Pierre Digard, anthropologue, directeur de recherche émérite au CNRS ; Christian Dupraz, directeur de recherches INRA, spécialiste de l’agroforesterie ; Frédéric Saumade,  anthropologue de l’élevage ; Barthelemy Chenaux, agronome ; Anthony Fardet, INRA ;  Christophe Dejours, psychiatre et psychanalyste ;  Robert Levesque, président d’AGTER (association pour l’Amélioration de la Gouvernance de la Terre, de l’Eau et des Ressources Naturelles) ; Natacha Polony, directrice de Marianne ; Rudy Pischiutta, directeur du Groupe ornithologique et naturaliste du Nord ; Patrick Lelièvre, instructeur d’équitation ; Marie-Christine Favé, vétérinaire ; Rudy Pischiutta ; Annette Roussel, conseiller municipal déléguée EELV de Dieppe, gérante de la Coopérative d’Albâtre de consommation de produits bio et locaux ; Anthony Fardet, chargé de recherches, INRA ; Frédéric Saumade, professeur, université d’Aix-Marseille ; Gérard Leras, ancien vice-président de la région Rhône-Alpes ; Aris Christodoulou, Président de SIGA ; Christophe Noiseux, journaliste, France Bleu Pays-d’Auvergne ; Péris Legasse, journaliste, Marianne ; Laurent Chevallier, médecin nutritionniste ;  Franck Mouly, conseil national du PCF ; Françis Wollf, professeur émérite de philosophie, Ecole normale supérieure ;  Denis Carel, paysan bio ; Nathalie Buisson, syndicaliste CGT ; Léa Lugassy, chercheuse en écologie et agron8omie ; Michel Ragot, Biolait ; Dominique Marion, paysan bio ; Alain Véronèse, Agir contre le chômage ; Amélie Charvériat, Réseau AMAP Auvergne-Rhône-Alpes ;  Léa Lugassy, chercheuse en écologie et agronomie ; Nathalie Bourras (apicultrice, membre de la Confédération paysanne, candidate France Insoumise aux élections européennes ; Romain Dureau, ingénieur agronome spécialisé dans les systèmes d’élevage herbager, candidat France Insoumise aux élections européennes ; Laurent Thérond, viticulteur, membre de la Confédération paysanne, candidat France Insoumise aux élections européennes ; Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail, GDS ; Gérard Aschieri, syndicaliste ; Gilles Luneau, réalisateur ; Patrick Vassallo ; Jean-Michel Drevon, syndicaliste ; Gustave Massiah, économiste ; Jean-Claude Balbot, paysan ; Maxime Vivas, administrateur du site Le Grand Soir ; Fabrice Flipo, philosophe ; Laurent Paillard, philosophe ; Josef Zisyadis, Slow-food suisse, membre du Conseil national suisse de la FAO ; Caroline Mecary, ancienne Présidente de la fondation Copernic ; Françoise Dauisse, auteur réalisatrice ; Fanny Soulier ; Jean Malifaud, fondation Copernic ; Eric et Catherine Bottin ; Lucien Degoy, journaliste ; Pierre Khalfa, fondation Copernic ; Florent Bussy, philosophe ; Pierre Zarka, ancien député, ancien directeur de l’Humanité, OMOS ; Fabrice Flipo, philosophe ; Gilles Boitte, psychologue ; Daniel Rome, militant altermondialiste ; Pierre-François Grond, FI ; Pierre Cours-Salies, philosophe ; Edouard Schoene, syndicaliste, membre du PCF ; Samy Johsua, ancien professeur en sciences de l’éducation ; Monique et Michel Sanciaud, membres d’Attac ; Jacques Testart, biologiste ; Gérard Aschieri, syndicaliste ; Jean-Marc Serekian, médecin ; Richard Lagache,  éditeur ; Jean-Luc Pasquinet, décroissance IDF ; Catherine Gonnet, Observatoire International de la Gratuité ; François Gèze, éditeur ; José Touar, syndicaliste ; Sophie Wahnich, historienne, directrice de recherches au CNRS ; Jacques Lerichomme ; Hélène Deutsch-Rome, Christiane Dedryuer, ACU ; Patrick Vassallo ; Cyril Cineux, adjoint au maire de Clermont-Ferrand, PCF ; Paul Polis et les membres solidaires du GIE Zone verte ; Jean-Claude Duclos, administrateur et co-fondateur de la Maison de la transhumance ; Patrick Fabre, directeur de la Maison de la transhumance ; Ludo Faurie, éleveur ; Patrick Lelièvre ; Nicole Bochet, agronome en retraite ; Mathurin Peschet, cinéaste, documentariste, auteur du film « Cousins comme cochons » ; Alain Boutonnet, vétérinaire ; Agnès Briançon, éleveure ; Pauline Perdrix, éleveure ; Nicolas Gruer, éleveur à la retraite ; Yvert Simon et Thiroux du plessis Galatée, éleveurs ; Xavier Noulhianne, éleveur ; Laurent Chalet, éleveur de vaches nantaises ; Pascal Bodinier, boucher de campagne ; Sébastien Mouret, chercheur INRA ; Vanina Deneux, doctorante INRA ; Nicolas Lainé, chercheur LAS (CNRS/EHESS) ; Félix Jourdan, doctorant INRA ; Charles Stepanoff, Maître de conférences. Ecole Pratique des Hautes Etudes ; Marc Vincent, ingénieur INRA, en retraite ; Diane de Camproger, doctorante, Université de Caen ; Sandrine Fanon, La boîte du chef, Canada ; Sophie Nicod, chargée de mission recherche, Ecole Blondeau ; Camille Eslan, doctorante, Institut Français du Cheval et de l’Equitation ; Lise Gaignard, psychanalyste ; Jeremy Magand, éleveur ; Marina Pourras, éleveure ; Estelle Deléage, Maître de conférences. Université de Caen ; Max Tortel, éleveur de cochons bio plein air, transformateur ; Yann Robin, éleveur ; Gisèle Alexandre, chercheure INRA ; Sébastien Guilhemjouan, Fédération des Travailleur de la Terre et de l’Environnement ; Emilie Jeannin, éleveure, « Le boeuf éthique » ; Marion Débats, éleveur ; Oliver Dickinson, documentariste, auteur du film « Un lien qui nous élève » (2019) ; Céline Vial, ingénieur de recherches, Institut Français du Cheval et de l’Equitation ; Léo Coutellec, Enseignant-chercheur en philosophie des sciences, Université Paris-Sud, membre du collectif « Pour des alternatives agri-culturelles » ; Michel Meuret, chercheur INRA ; Miguel Benasayag, philosophe et psychanalyste, membre du collectif « Malgré Tout ; Fabrice Nicolino, auteur du livre « Bidoche », l’industrie de la viande menace le monde ». Actes Sud ; Jean Estebanez, maître de conférences, UPEC ; Christelle Leissner, éleveure ; Jean-Philippe Choisis, Ingénieur de Recherche, INRA ; Aude Vidal, autrice et éditrice,  « On achève bien les éleveurs » (avec Guillaume Trouillard)2, Editions de l’Echappée ; Laurence Arpin, vétérinaire, Mont-Joli, Québec, Canada ; Jean Gardin, Maître de conférences en géographie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ; François Jarrige. Maitre de conférences en histoire, Université de Bourgogne – IUF ; Stéphane Dinard, éleveur, président de l’association « Quand l’abattoir vient à la ferme » ; David Grangé, éleveur ; Hugo Valls, chercheur CIRAD ; Sylvain Golé,  Centres d’Etudes et de réalisations pastorales (CERPAM) ; Perrine Cadoret, éleveure ; Estelle Janin, éleveure ; Benoît Leibzig, éleveur ; Claire Lamine, chercheur INRA ; Pierre-Louis Osty, chercheur honoraire, INRA ; Nathalie Debus, chercheure INRA ; Claude Soulas, ingénieur agronome et pastoraliste ; Johann Hugenin, chercheur CIRAD ; Jean-Louis Fiorelli, ingénieur de recherche, INRA ; Agnès Briançon, présidence de l’association « Homéo à la ferme » ; Véronique Ancey, chercheure CIRAD ; Roger des Prés, La Ferme du Bonheur, Nanterre ; Florence Hellec, chercheure INRA

LE BIO, AU RISQUE DE SE PERDRE…

Jeudi 15 février sort mon nouveau livre, chez Buchet-Chastel. Après l’Assiette est dans le Pré (paru en octobre 2017 chez Delachaux & Niestlé), je continue ma petite exploration de la bouffe. De ce qu’elle nous dit de la société. De sa force de persuasion politique. Manger, c’est voter, comme ne cesse de le revendiquer mon préfacier, Périco Legasse. C’est peut-être voter plus efficacement que de laisser tomber un bulletin dans une urne ! Manger est un acte social, car manger correctement, c’est demander à l’agriculture de travailler correctement. C’est lui donner plus d’argent, donc plus de forces face au gang à chemisette-rayures-cravate de la Grande distribution. Mais manger mieux, à tous les sens du terme, est-ce forcément manger bio ? Non ! Car le Bio est la cerise que l’on va chercher après qu’on a su se reconstituer le bon gâteau d’une hygiène de vie et d’une culture alimentaire riche et diversifiée. À quoi bon manger bio si c’est des plats tout préparés livrés par messagerie ou des tomates en hiver cueillies en Espagne par des semi-esclaves marocains ? À quoi bon manger bio si c’est pour donner des sous à Leclerc et, bientôt, Amazon ? Le bio est un humanisme, une philosophie naturaliste qui s’oppose au système agroalimentaire tel qu’il est aujourd’hui, et au fascisme naissant qu’est le véganisme. Mais le bio est fragile, travaillé qu’il est par des contradictions internes et les formidables pressions de l’industrie et de la Grande disitrbution qui, toujours, essaient de phagocyter ce qui les menace. La crise de croissance est bien là. Elle peut ouvrir l’avenir sur un nouvel équilibre, une ligne d’horizon attirante pour ces 20% d’agriculteurs qui sont déjà en train de changer de modèle ; ou être l’idiot utile du processus d’élimination de l’agriculture humaine et paysagère, au profit d’une moléculture hygiéniste, tracée, propre à destination de purs esprits urbains effrayés par le sang, le sol, les épluchures, le gras et la mort. Attention, danger… Voyage et rencontres en 128 pages.

Le Bio, non, La Bio, oui

(la préface et le préambule, pour vous donner envie)

Préface

Bio ? oui, mais bio…

Si la fin de l’humanité est déjà programmée par elle‐même, à grands renforts de croissance néolibérale, il est encore sur terre des fous furieux qui prétendent retarder ce processus en accordant une bribe d’espoir aux générations futures. L’espoir de ne pas laisser cette planète à leurs enfants dans l’état lamentable où ils l’auront trouvée. Quand la CoP 36 se tiendra sous abri antiatomique, la giboulée de mars ayant viré à l’ouragan ordinaire, et que les 10e états généraux de l’alimentation suggéreront la limitation du nombre de vaches d’une ferme moyenne à 10 000 têtes, nos gouvernants se diront que les affreux lanceurs d’alerte du début du XXIe siècle étaient optimistes dans leurs pires prédictions. Un tantinet plus lucide que les autres, doté d’un bon sens à peine enrichi par la rigueur de ses enquêtes, Frédéric Denhez est l’un de ces fous furieux. N’y allons pas par quatre chemins : l’ouvrage que vous avez entre les mains n’est pas le énième coup de gueule d’un indigné du bocage meurtri ou d’un révolté du gâchis alimentaire qui nous ruine, mais une interpellation légitime, un document fondateur dont la dimension politique dépasse de loin les promesses électorales du plus visionnaire des leaders écologistes.

Nous en sommes tous d’accord : à près de 7 milliards d’habitants, la maison commence à brûler ; à 10 milliards, les pompiers les plus valeureux n’y pourront plus rien si ce monde ne se repense pas. Il est pourtant un constat évident : si nous continuons à consommer de cette façon, la jolie boule bleue qui tourne en orbite autour du Soleil entre mars et Vénus ne pourra plus fournir. Cela fait plus de soixante‐dix ans que l’on ment à notre terre nourricière en lui faisant croire qu’elle est inépuisable. À force de l’exploiter, de la violer, de la pomper, de la bétonner, donc de la contourner, la cave se rebiffe. Lorsque apparut l’idée que l’on pouvait cultiver son jardin en fonction de ses justes besoins, selon ce que permet la nature, en créant une équation solidaire entre l’appétit humain et la fertilité des sols, d’aucuns admirent que cela méritait d’être érigé en éthique de vie. « La terre à ceux qui la travaillent », clamaient les premiers libertaires. Certes. elle est désormais à ceux qui la respectent. Lorsque Raoul Lemaire et Albert Howard, puis Hans et Maria Müller, comprirent l’urgence d’une méthode de production préservant la santé des sols, des écosystèmes et des personnes, on crut qu’une alternative à la détérioration de l’environnement par le productivisme agrochimique était enfin trouvée. Cette lueur a provoqué un séisme, éclairant les consciences, bouleversant la donne, suscitant des passions dignes des plus véhéments débats philosophiques, mais lorsque l’on observe posément ce que le bio est en train de devenir, on frémit d’effroi. Si l’Inquisition n’est pas inscrite dans les évangiles, ni le goulag dans Le Capital de Karl Marx, il faut croire que les concepteurs du projet biologique n’avaient pas prévu que les trois lettres qui devaient sauver le monde, sans être aussi dévoyées que purent l’être les deux messages que je viens de citer, ne suffiraient pas à pérenniser la biodiversité planétaire par leur seule apposition sur un pot de yaourt ou un paquet de carottes.

Depuis le label Demeter de 1927, aussi pur que l’était un chrétien des Catacombes, une église s’est emparée de la bonne nouvelle, avec son clergé et sa liturgie, oubliant qu’il ne suffit pas d’aller à la messe tous les dimanches et d’assurer le denier du culte pour aimer son prochain comme soi‐même. Que nous dit Frédéric Denhez ? Que le bio est une foi, pas un dogme ; un comportement, pas une posture ; un sentiment, pas une sensation ; une résolution, pas une stratégie. Le bio a ses tartuffes et ses pharisiens, ses collabos et ses intégristes. Pire encore, comme la laïcité, ses détracteurs veulent l’adapter aux enjeux moins‐disants du moment pour mieux détruire ce qu’il doit protéger.

renvoyant dos à dos les organismes professionnels et les associations militantes dont les membres, aussi sincère et respectable que soit leur engagement, ne semblent pas avoir bien saisi l’immensité du défi, l’auteur tient le seul discours qui vaille à l’heure de la vérité : ou l’idéal agroécologique devient une façon d’être et de penser, ou il se verra vider de son sens.

Voici, parmi d’autres considérations pertinentes, ce qu’il faut retenir de ce courageux décryptage de la réalité du bio. L’analyse est sévère et le verdict sans concession, en effet, mais c’est à ce prix que l’on pourra empêcher la malbouffe financiarisée et le marché qui la régule de dévoyer notre seule espérance de survie. Une façon de dire «non» à une dérive, qui dit «oui» à la redéfinition d’une pédagogie salutaire.

Faisant l’autre jour mes courses dans la supérette organique où je me fournis quotidiennement, je tombai, à l’enseigne d’une marque durable reconnue, sur un camembert bio… au lait pasteurisé. Lisant l’ubuesque étiquette, je me disais que Frédéric Denhez n’a peut‐être pas tort. Espérons seulement qu’il n’ait pas totalement raison.

Périco Légasse, rédacteur en chef à Marianne

Préambule

Il y a des préfixes qui se libèrent. Ils s’émancipent, s’échappent et s’accolent où ils veulent. Ils ont le pouvoir. Ils n’ont plus besoin de mots pour exister. Ils sont leur propre définition. « éco » avait ouvert le bal, « bio » a suivi. aujourd’hui tout est éco, et tout est bio. Dire « bio » suffit à dire que c’est bien. en fait, c’est synonyme. C’est un brevet, une onction, le saint chrême, c’est donc douteux. Même le psy le moins perspicace sait que l’excès cache souvent le vide, qu’il est un cri de détresse plutôt qu’une revendication. Intéressez‐vous à moi ! Alors, tout est bio, mais aussi équitable, durable, responsable, solidaire et collaboratif, évidemment. achetez‐moi ! Et ne regardez pas trop l’étiquette. assurément, c’est louche. Car si tout est bio, c’est que rien ne l’est !

Devenu objet de marketing, le bio est un élixir qui change tout en vert, tout est question de dosage. Employé à tort et à travers, il peut aussi se ridiculiser. Bio, c’est bien, c’est moderne, mais cela peut tout aussi bien évoquer le passé, le passéisme, la nostalgie, le monde d’avant et le repli sur soi. Un excès, dans l’autre sens. Le même psy peu lucide verrait le même écran placé face à la réalité, la même image, projetée par ceux qui plaquent sur le bio ce qu’ils n’assument pas, rêves ou cauchemars. Une stratégie de défense qui en dit long sur le tumulte de la société.

Le bio dérange. Il cristallise plein de choses. Il est là, superbe, totémique, parce que nous sommes dans un entre‐deux. Mais qu’est‐il vraiment ? Une belle philosophie, qui peut tout autant illuminer l’avenir qu’être réduit à un rayon vert. Le bio est ce que nous en ferons. Attention, danger…

Le livre sur le site de l’éditeur : ici.

Un extrait téléchargeable : .

Éditrice : Christelle Fontaine

Attaché de presse : Emmanuel Amar (06 18 06 42 71)

Date de parution : 15/02/2018

Format : 13 x 20,5 cm, 128 p., 12,00 EUR €

ISBN 978-2-283-03114-8

Avec le petit bandeau :

Un petit papier dans l’Évangile de l’édition, Livres Hebdo :

Le communiqué de presse :

LA SEINE ET LE NUTELLA, REFLETS DE NOTRE INCONSCIENCE

Dans Libération du 25 janvier, Magali Reghezza-Zitt, maître de conférences à l’École normale supérieure, déplore le je-m’en-foutisme général à propos de la crue. Les médias ont beau avoir transformé la montée des eaux en invasion toxique, ils passent largement sur la seule question qui vaille : aujourd’hui, ça va, comme il y a deux ans – déjà, mais demain, quand l’inévitable crue centennale adviendra ? A-t-on une idée précise des conséquences sur la première région de France ? Sur celle qui, ainsi que le précise Me Reghezza-Zitt, « concentre près de 19 % de la population métropolitaine, 24 % des emplois, 30 % de l’activité économique de la France, et 40 % de la recherche et développement, sans compter les fonctions régaliennes, les administrations, les infrastructures logistiques, etc. » ? La réponse est dans la question : ce serait catastrophique. Surtout quand on regarde ces abrutis se battre pour des pots de Nutella en promotion chez Intermarché. L’ennemi de la raison c’est l’acte réflexe, et la cécité volontaire. Voici le texte que j’ai écrit en 2015 à la suite à un grand débat qui s’était tenu à Boulogne-Billancourt à propos de notre (im)préparation à la crue centennale. Il reste d’actualité. La prise de conscience a depuis évolué dans le bon sens, mais elle n’a pas encore atteint notre cerveau reptilien. L’inondation reste un marronnier médiatique, un impensé. Hélas. 

La Seine : quand elle débordera vraiment nous ne serons toujours pas prêts…

C’est celle dont on se souvient le plus 1910. Parvenue à la barbe du zouave, la Seine de cette année-là sortit de son lit pour se coucher au pied de l’Opéra. Photographiée, filmée, enregistrée, elle est, depuis, la star des inondations. La référence en matière de Paris-sous-l’eau. À peine trois morts, mais 100 000 soldats mobilisés, quatre ans avant la Guerre, le métro façon « conduite d’eau » et les Parisiens en barques ou se déplaçant, haut-de-forme et jaquette, sur des petits ponts de bois.

Ce ne fut pourtant pas la pire, ni la plus importante, nous disent les historiens et les hydrologues. Sur les soixante-deux inondations qu’a connues la capitale de la France depuis 1500, 18 sont survenues au cours du XVIIe siècle, et 14 entre les années 1700 et 1740. Avant, il y en eut aussi, et des bien meurtrières.

Sainte-Geneviève a souvent eu les pieds dans l’eau

En fait, quand on regarde bien, l’histoire de Paris est ponctuée de processions en l’honneur de Sainte Geneviève, la protectrice de la capitale, dont le clergé sortait les reliques afin de convaincre Dieu de bien vouloir faire dégonfler le fleuve. C’est que l’eau est, toujours, ce qui a le plus fait peur aux hommes. C’est elle qui, écrit Emmanuel Le Roy Ladurie, a de tout temps le plus abîmé, détruit et tué. Qu’elle soit trop abondante ou par trop manquante, l’eau est la première catastrophe.

Sauf que… muséifiée depuis 1910 dans un noir et blanc amusant, l’inondation « centennale » n’est plus dans notre esprit naïf qu’un aléa banal que notre génie a su contraindre. Si le fleuve déborde à nouveau, il sera conduit par le corset des berges jusqu’à des barrages-réservoirs qui le retiendront avant de le relâcher. On ne craint rien ! Dans un pays où l’on se tourne vers le maire ou l’État à la moindre ampoule qui claque, il n’y a pas lieu de s’inquiéter. Nous sommes un pays d’ingénieurs, non ? Après tout, quelle que soit la catastrophe, l’arrêté de catastrophe naturelle est signé et les victimes sont remboursées, non ?

5 millions de… réfugiés !?

Les participants au colloque « Mise en Seine » ont démontré d’une voix étonnamment chorale que notre confiance en la technique et l’arrêté de catastrophe naturelle relève largement de l’ignorance, voire de la cécité volontaire. « Tout le monde s’en fout, politiques comme citoyens », ont-ils clamé en substance. « On ne réagira, trop tard, que lorsque l’eau sera là ». Quand ? Nul ne le sait. La Seine ne déferle pas à la manière d’un torrent, elle monte lentement. On aura donc le temps, la prochaine fois, de voir venir. « Mais justement, si elle met des jours à monter, elle mettra aussi des semaines pour redescendre… ». Le temps pour elle de bien imprégner les réseaux de distribution, de transport et de communication, les fondations des maisons, les terrains fragiles, les stations d’épuration, les sites de stockage de produits dangereux, les champs agricoles, les berges des ports.

Selon l’OCDE, la prochaine crue majeure de la Seine, égale, au moins, à celle de 1910, générera dans les 600 000 chômeurs et peut-être deux fois plus de personnes mises en situation difficile c’est-à-dire, en termes de sécurité civile, susceptibles de devoir ficher le camp de sa maison. Peut-être 5 millions de Franciliens n’auront plus accès à l’un ou l’autre des réseaux. « Comment gérer autant de gens en autant de temps ? ». On ne sait pas. « La solidarité jouera quelques jours, peut-être quelques semaines, mais qu’en sera-t-il après quelques mois ? ». En effet, en 2002 dans le Gard, quatre cents familles eurent à être relogées, ce que l’on ne put faire que longtemps après l’inondation, parfois dix-huit mois !

Fioul et dominos

Le problème sera avant tout celui de la pollution, comme l’ont montré les inondations récentes à New York, Dresde, Prague, Dublin ou dans le sud de l’Angleterre. Les cuves à fioul flotteront, pour finir par se vider. Les voitures surnageront, mais leur contenu s’en échappera. Et puis rien ne dit que les usines d’épuration de l’eau seront encore fonctionnelles. « Le problème n’est pas tant que l’eau inonde, c’est qu’elle sera sans doute souillée ». L’autre grande interrogation est celle de l’effet domino le gestionnaire du réseau électrique qui coupe préventivement un poste de distribution stratégique, ce qui entraîne l’arrêt brutal d’une antenne-relais de téléphone mobile ou d’une pompe affectée au maintien au sec d’une voie du RER…

Une culture du risque proche de l’étiage

En fait, la résilience des réseaux est bonne… pris isolément, car chaque opérateur, comme d’ailleurs toutes les grandes entreprises, s’est préparé à la fois à la crue, et à l’après-crue. Mais considérés dans leur réalité, interconnectés qu’ils sont, les réseaux ne sont pas résilients. D’autant moins qu’ils font vivre une population largement… déconnectée de toute culture du risque, enfermée dans la certitude que rien de grave ne pourra arriver, et que quand bien même, les assureurs et l’État feront le nécessaire. « Fantasme de la protection absolue » derrière des digues qui ne font plus craindre l’épée de Damoclès, « sous-estimation des conséquences », généralement partagée. Nous sommes en 2015 comme nous étions il y a trente ans au sujet du tri des déchets. Au début. Entre le je-m’en-foutisme, l’à-quoi-bonisme et l’après-nous-le-déluge il y a tout à faire. C’est-à-dire de la communication. De la vulgarisation. De la pédagogie. Mais qui, à Paris et ailleurs, a récemment entendu parler de l’inondation à venir ? Qui a eu vent des exercices de préparation, d’évacuation, d’accueil de réfugiés organisés dans le cadre de l’opération Sequana l’an prochain ? Qui sait quoi faire quand l’eau sera là ? Personne ! Parce que l’information concrète, non catastrophiste, dédramatisée, régulière, manque. Bref, les « élites », celles qui étaient présentes lors du colloque, savent, mais le reste de la population ne sait pas. Encore que l’on peut se demander si autant de gens sont nécessaires pour présider à la résilience de l’Ile-de-France. Ne sont-ils pas trop nombreux, eux qui, disant tous la même chose, ont l’air de se marcher sur les pieds ? Une réelle autorité chapeautant l’ensemble des services de l’État et territoriaux ne serait-elle pas plus efficace en matière de cartographie précise des enjeux, de campagnes de communication et d’aides aux petites entreprises qui n’ont certes pas les moyens des grosses pour tenir le coup social durant les mois d’inactivité forcée ?

Les sols, la biodiversité, les TVB, efficaces barrières anti-crues

Une autorité qui s’occuperait de l’eau et des sols. Car – cela a été largement souligné lors du colloque – les sols participeront plus qu’il n’en faut à la prochaine inondation. En premier ceux qui n’existent plus, couverts qu’ils sont par des parkings, des rocades, des lotissements et des centres commerciaux. En second parce que les sols trop labourés, trop profonds, sont tellement déstructurés que leur capacité à retenir l’eau de pluie est atténuée et qu’en hiver, alors qu’ils sont nus, ils deviennent aussi durs et étanches qu’une croûte de macadam. Aujourd’hui les sols favorisent le ruissellement, c’est-à-dire le galop de l’eau qui pleut vers les rivières qui grossissent et inondent. Voire, ils peuvent aussi aggraver l’inondation qu’ils ont contribué à amplifier entraînée par l’eau qui tombe du ciel ou déborde, la terre trop fine, parce que trop travaillée, peu maintenue par les racines, se mêle à l’eau qu’elle transforme en une boue bien plus dévastatrice.

La prévention des crues est en définitive autant une affaire d’eau que de sols. Donc, d’agriculture. In fine, d’aménagement du territoire. Laisser aux sols le temps d’absorber l’eau qui leur arrive. Comment ? En laissant le sol vivre ! Celui des zones humides, évidemment. Mais aussi les prairies, permanentes ou temporaires, les bandes enherbées qui servent de frontière entre champs et rivières, et… les parcs urbains riverains et les berges « végétalisées ». Sans compter les haies et tout ce qui, le long des courbes de niveau, freine l’eau. Finalement, en s’alliant la biodiversité pour se prémunir un peu contre l’inondation, on redécouvre les trames vertes et bleues. Ce qui favorise la biodiversité nous aide à limiter la casse !

La Bassée, est-ce trop dépenser ?

Le Schéma départemental de gestion et d’aménagement de l’eau, le SDAGE, a justement pour vocation de « laisser de l’espace libre au fleuve ». Difficile avec une telle densité de population. Le foncier manque déjà pour construire des logements. Le constat est pourtant clair on ne peut plus se permettre d’étanchéifier autant les zones inondables de la région, déjà couvertes à 90 % au cœur de Paris. Construire, certes, mais en préservant des usages multiples mine de rien, en remodelant les berges de façon à ce qu’elles accueillent aussi bien des promenades plantées que des zones industrielles, des plages que des zones humides, en réaménageant les ports pour qu’ils soient des éléments des trames vertes et bleues, on dit symboliquement que nous acceptons les aléas de la nature, parce que nous nous desserrons des appareillages techniques, du génie civil qui ne peut pas nous garantir à 100 %. Que faire du projet de la Bassée alors ? Ces casiers sont voués à retenir la Seine montante, le temps que passe le flot de l’Yonne, définitivement incontrôlable. La conjonction des deux flux fut en effet à l’origine de la crue géante de 1910. Mais de l’avis général, plus ou moins entendu lors de ce colloque, « dépenser un argent considérable pour un système qui ne nous mettra pas à l’abri d’une crue majeure n’a pas beaucoup de sens »… Par contre, il semblerait qu’il y en ait plus, du sens, à dépenser près de quarante milliards pour un Grand Paris Express mal conçu et à l’efficacité douteuse. 

Les fleuves ? Moins que les pipelines…

De l’avis général également, la Seine est sous-utilisée. Comme l’ensemble du réseau fluvial français. La France est la première façade maritime d’Europe, et la seconde zone maritime mondiale. Qui s’en soucie ? Pas grand monde. Elle possède également le plus grand kilométrage européen de voies

navigables, plus de 8 000 km. Mais qui s’en soucie ? Peu de monde, car autrement, ce ne serait pas 2, 3 % à peine des marchandises qui emprunteraient la péniche plutôt que le camion, l’avion ou le train, mais au moins 25 % comme en Allemagne ! Par les fleuves transitent moins que par les pipelines, le constat est cruel. Mais voilà, la France a préféré investir sur la route, puis sur le TGV, oubliant que le corollaire de la massification qui est le véhicule de la mondialisation, par la mer, est la barge fluviale et le convoi ferré.

Pas de BTP sans Seine

Certes la Seine tient son rang, car l’essentiel des matériaux de construction, des granulats, et, dans l’autre sens, des déblais de chantier et des déchets lourds, sont véhiculés par elle. Mais ce rang pourrait être plus grand encore. Le réseau a été notoirement sous-investi. Les ouvrages d’art qui le ponctuent ne sont pas fiables. Selon VNF, des canaux importants n’ont toujours pas été requalifiés en « grand gabarit » afin de faciliter le passage des barges lourdes de 5 000 tonnes (équivalents à 200 semi-remorques) un élément du projet d’aménagement de La Bassée. Il manque des liaisons nettes, entre Le Havre et la Seine comme entre Fos et le Rhône. Il manque toujours ces grands canaux que sont le Seine-Escaut, qui devrait quand même voir le jour, et le Rhin-Rhône, aux oubliettes.

Il manque aussi des facilités d’accès. Du foncier, afin que les ports puissent exercer vraiment leur vocation de zones logistiques, vers lesquelles les ports maritimes évacueraient au plus vite leurs conteneurs et leurs vracs divers. Des ports facilités dans leurs tâches alors qu’élus et citoyens veulent tout à la fois des magasins près de chez eux, mais pas les affres de la livraison, quand bien même le serait-ce par la si vertueuse barge. Le pli est néanmoins pris depuis quelques années. La convention signée entre Voies navigables de France (VNF) et la Région a montré la cohérence réelle de celle-ci dans sa politique de transports quasi-autorité organisatrice du transport de marchandises, la Région, par ailleurs engagée dans un contrat de plan État-Région, accompagne le développement des ports de Gennevilliers, Achères et Bonneuil, et participe, avec l’Établissement public foncier, au réaménagement portuaire des anciennes papeteries de Nanterre.

La mise en Scène commence enfin

Ce n’est pas facile car on part de très loin, mais les cieux franciliens de plus en plus obscurcis par la pollution, la ferme volonté de la Mairie de Paris de proscrire sa voirie à tout camion non motorisé en Euro 6, l’attractivité nouvelle des ports maritimes français qui accroît le besoin d’évacuer au plus vite les marchandises débarquées, l’évidence que les travaux considérables inscrits dans le projet du Grand Paris ne pourront être menés sans l’aide du fleuve, l’aboutissement sans doute proche du projet de canal Seine-Escaut… Tous ces constats nourrissent un relatif optimisme.  La France se remet à nouveau les pieds dans l’eau pour mieux voir passer ses péniches. Tout en scrutant le ciel afin de déceler le reflet qu’aura demain la Seine, perturbée par la variabilité chaque année plus forte du cycle de l’eau soumis au réchauffement climatique.

La mise en scène ne fait que commencer. Elle tarde un peu, tout de même.

BIODIVERSITÉ, UNE OFFRE ILLIMITÉE ?

Voici ce que j’ai pensé des deux jours de débats organisés par l’Institut régional (normand) du développement durable, l’IRD2, en mars 2017, à Caen., sur le prix de la nature. Comme d’habitude, ces débats ont été le point d’orgue d’un de ces programmes pluriannuels dont l’IRD2 a le secret. De l’information, de la formation, de la pédagogie, sans donner de leçons aux élus et le grand public pour leur faire comprendre les enjeux de la société. Un exemple unique en France de médiation intelligente entre la science et nous tous. Merci d’applaudir la directrice de l’IRD2, Sophie Raous, qui porte ce projet depuis le début.
(Les textes de cette infolettre sont publiés par divers supports, gratuits et payants, numériques et papier. J’ai décidé de vous offrir ce texte par la version mise en page et diffusée par l’IRD2, pour voir. Si ça ne passe pas, dites-le moi par mail, et je referai une infolettre en format texte. Merci!)

© IRD2

MES VŒUX !

Bonjour à toutes et tous. Pour une fois, je ne vais pas vous affliger d’une infolettre interminable. Celle-ci sera courte, car ce sont mes vœux. Je vous souhaite un excellent début d’année, sous Eléonore, qui, dans le Nord où je me trouve, couche les arbres et arrache les tuiles. Avec un prénom aussi moche, cela dit, fallait pas s’attendre à autre chose. À bientôt pour une infolettre (une vraie) consacrée… au prix de la nature.

© Corinne Chenet, photo prise kekpart dans les Abruzzes, me demandez pas, je sais plus.